Le Cambodge est à la croisée des chemins, à une espèce de point de rencontre entre passé et avenir. Effectivement, deux événements majeurs vont marquer cette année 2008 : d’une part les premiers procès des quelques hauts dirigeants Khmers Rouges poursuivis par les tribunaux mixtes créés pour juger le génocide des années 1975-1979, d’autre part les élections législatives du 27 juillet. En apparence tout concourt à ce que le Cambodge redevienne cet îlot de paix et de liberté qu’il n’aurait jamais dû cesser d’être.
Pourtant, à y regarder de plus près, on ne peut que constater que nombre d’obstacles se dressent encore sur cette route : une crise sociale profonde, une « présence » vietnamienne massive sur le territoire cambodgien (ressentie parfois comme une annexion pure et simple), des atteintes aux droits de l’homme et à la liberté de la presse régulièrement dénoncées, un émiettement des forces politiques qui favorise le maintien au pouvoir des mêmes dirigeants depuis 1985, une incapacité culturelle et politique à aboutir à une véritable réparation judiciaire et civile de la folie meurtrière des Khmers Rouges.
Pour évoquer le défi qui se pose au Cambodge de ce début de XXIe siècle, Conflits actuels pour ce numéro 20 (2007-2) a fait le choix de se tourner vers les Cambodgiens eux-mêmes, c’est-à-dire de délibérément laisser poindre le témoignage sous l’analyse. Car, qu’il s’agisse des drames terribles vécus autrefois par ce pays ou des difficultés actuelles, c’est bien vers l’homme qu’il faut se tourner (de sa négation comme moteur du génocide jusqu’à l’espoir du changement que porte en elle la jeunesse cambodgienne).