Par Frédérique Giraud
A l’heure du web 2.0, des blogues, des wikis, Jean-Michel Salaün et Clément Arsenault effectuent dans ce « grand manuel » de la collection Repères à la Découverte, un travail salutaire de (re)définition de ce que sont aujourd’hui les « informations », les « documents », les « connaissances ». Ils proposent un parcours cohérent et didactique depuis la description des acteurs (les professionnels de l’information et les utilisateurs), la présentation des contextes (institutions et missions) jusqu’aux techniques de traitement, de recherche et de diffusion de l’information. Destiné aux étudiants en master professionnel, ce manuel vise non pas à fournir les fondements théoriques des sciences de l’information, mais bien plus privilégie une approche pragmatique avec un texte orienté vers la présentation de savoirs et pratiques concrets. Un index permet une lecture ciblée et autonome de chaque chapitre. A la fin de chaque chapitre un choix de références bibliographiques est proposé pour les lecteurs qui désireraient approfondir leur lecture. On doit noter d’une part, que ce manuel est un ouvrage à multiples mains, chaque chapitre ayant été pris en charge par un collectif de professionnels et que d’autre part, rédigé par l’ensemble des professeurs de l’Ecole de bibliothéconomie et des sciences de l’information (EBSI) de l’Université de Montréal, ce manuel offre la particularité de choisir des exemples à la fois français et canadiens.
Les chapitres 1 et 4, respectivement « Les professions et les institutions » et « Les pratiques des utilisateurs », sont les plus généralistes. Le premier chapitre propose une typologie resserrée des professions de l’information (bibliothécaire, archiviste, documentaliste...), des institutions (bibliothèques nationale, universitaires, publiques, services d’archives) et des associations et revues professionnelles spécialisées. Le quatrième chapitre s’interroge sur les pratiques des utilisateurs et souligne l’évolution dans le temps des pratiques face aux divers médias et sources d’informations, et surtout face à l’émergence du numérique et d’Internet. Ces deux chapitres offrent une vue large et globalisante d’une lecture facile. Les chapitres 2 et 3 (sont (beaucoup) plus techniques, et même s’il s’agit d’un volume d’introduction aux sciences de l’information, le détail des présentations devient vite compliqué pour un public novice. Celui-ci se trouvera vite perdu dans la masse des informations ( !), le manuel convenant d’abord à un public converti et professionnalisé.
Le second chapitre intitulé « Le traitement du document » traite de la description des documents. Opération majeure de la gestion bibliographique, la description des documents vise à obtenir une information structurée, organisée selon des normes établies et reconnues, afin de la rendre à la fois pérenne, identifiable et disponible. Sont présentés les différentes normes et formats d’encodage des informations (International Standard Bibliographic Description, Règles de Catalogage Anglo-américaines, Règles pour la description des documents d’archives, MAchine Readable Cataloging, Dublin Core...), mais également les structures classificatoires et les schèmes de classification documentaire (Classification décimale de Dewey, Classification de la Library of Congress, Classification à facettes de Ranganathan. Description, classification, indexation sont décrits avec détail. Le troisième chapitre consacré à « La recherche d’informations » décompose le processus de recherche d’information : celui-ci consiste à « mettre en correspondance, à l’aide de diverses fonctions de comparaisons, les éléments d’une requête avec ceux qui ont été choisis pour représenter le contenu des documents. » (p109) Sont décrits les modèles cognitifs formels de recherche d’information (Modèle de construction individuelle du sens (Devin), Modèle de construction organisationnelle du sens (Weick), Modèles des états normaux de connaissances (Belkin)...), les sources et services d’information (commerciaux et ressources en accès libre), les modalités de recherche (mode « furetage », mode « recherche »), avant de présenter les techniques de recherche les plus usuelles de bon nombre de systèmes de recherche (ensembles et relations, opérateurs boléens...)
Le cinquième chapitre part de l’idée que l’information constitue une ressource stratégique, ce qui implique qu’elle doit être « gérée au même titre que les ressources humaines, matérielles ou financières, dans les organisations » (p. 184). Décrivant la « gestion stratégique de l’information », c’est-à-dire le fait de « fournir la bonne information à la bonne personne au bon moment » (p 184), ce dernier chapitre se veut une initiation, qui renoue avec l’accessibilité plus nette des chapitres 1 et 4. Quatre concepts clés sont au fondement de cette gestion stratégique : la stratégie informationnelle, les politiques d’information (« plan qui encadre le développement des ressources, des services et des systèmes d’information, et permettant de maximiser leur utilisation tant par les individus que par les institutions » p 190), la culture informationnelle formée des valeurs, normes et comportements ayant un impact sur la façon dont l’information est perçue, et les comportements informationnels. Au nombre de ses composantes, on trouve la veille stratégique, définie comme « un processus à valeur ajoutée de collecte, de transmission, d’analyse et de diffusion d’information publiquement disponible.