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La médiation artistique en travail social. Enjeux et pratiques en atelier d’expression et de création

Un ouvrage de Francis Loser (ies éditions, 2010)

publié le samedi 12 mars 2011

Domaine : Sociologie

Sujets : Art , Travail social

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Par Gérard Creux [1]

L’ouvrage de Francis Loser (enseignant-chercheur à la Haute École en Travail Social à Genève) propose d’analyser ce qui est en jeu, tant pour les usagers que pour les professionnels, dans les ateliers de pratiques artistiques, et plus particulièrement d’arts plastiques qui se déroulent dans les établissements spécialisés du secteur sanitaire et social. Sa recherche s’articule autour d’un triple objectif : « mettre en lumière quelques enjeux et dynamiques majeurs qui sous-tendent la médiation artistique » telle qu’elle peut se pratiquer dans les ateliers d’expression et de création que l’on retrouve dans les structures du champ sanitaire et social ; le second objectif est d’offrir une meilleure lisibilité des pratiques liées à ces ateliers ; le troisième objectif renvoie à un aspect davantage utilitariste, à savoir positionner la « médiation artistique » comme un outil d’intervention professionnelle et « élargir l’offre de formation continue ». Le livre comporte trois chapitres : le premier constitue l’approche conceptuelle de la recherche et les deux chapitres suivants renvoient à l’analyse du terrain. Il comprend en annexes les outils méthodologiques (grille d’observation, canevas d’entretien) de la recherche et à la présentation du terrain. Par ailleurs « Le journal de terrain » est disponible et téléchargeable en ligne [2].

Francis Loser part du constat d’un développement des pratiques qui recourent à la médiation artistique dans les établissements sanitaires et sociaux. L’auteur note que « sur le plan relationnel, elles constituent un précieux point d’appui qui permet de réunir et séparer le professionnel et les usagers » (p.10). La construction de sa recherche s’appuie sur les réflexions des philosophes Hans Georg Gadamer et Alain Kerlan pour ce qui touche de la dimension esthétique ainsi que sur celles de Johan Huizingua et du psychanalyste Donald W.Winnicott pour ce qui renvoie au jeu et à la créativité. L’hypothèse clairement formulée par le chercheur est que l’expérience esthétique qui se réalise dans les ateliers des établissements spécialisés « relèverait moins d’un processus thérapeutique que d’une expérience humaine singulière, permettant aux participants d’éprouver pleinement leur humanité, dans la totalité de leur être » (p.14).

Précisant que l’expérience esthétique qui s’exécute à travers la médiation artistique n’est pas réductible au champ de la thérapie, elle sert aussi au rapprochement entre professionnels et usagers, et permet de dépasser le face à face qui peut devenir intrusif. Afin de saisir au mieux la réalité, l’auteur a fait le choix de l’observation directe (observation participante) dans des ateliers d’arts plastiques accueillant une population d’adultes. L’observation s’est déroulée dans trois ateliers : une institution accueillant des personnes ayant des problèmes liés à l’addiction à l’alcool, une structure accueillant des personnes âgées et un centre de rencontre et d’expression créatrice.
À l’observation participante dont l’auteur relève les limites (« forte part de subjectivité que sous-tend l’observation in situ »), Francis Loser ajoute une série d’entretiens réalisés auprès de trois animateurs d’atelier de création (qu’il dénomme ADAC « afin de ne pas alimenter la querelle autour des art-thérapies et autres conceptions qui s’appliquent aux activités qui recourent à la médiation artistique ») ainsi qu’auprès de participants à ces ateliers (sur la base d’entretiens plus informels).

À l’issue de son travail de terrain, Francis Loser rappelle son postulat, à savoir que « l’esthétique constitue un domaine spécifique de la connaissance et de l’agir, dans et par la sensibilité irréductible à l’ordre de la moral » (p.216). Cependant, si l’auteur reconnaît que le cadre conceptuel « ressemble peut-être à un puzzle dont les différentes pièces peuvent paraître insuffisamment reliées entre elles » (p.73), il note que son hypothèse n’est pas réellement validée, car « la démarche mise en œuvre n’a pas permis de réunir suffisamment d’indices » (p.223) du fait de la sélection de son terrain d’observation (focalisé sur les ateliers de création). Néanmoins, il note que ce qui se réalise dans ces ateliers ne peut se réduire à une dimension thérapeutique. À travers l’analyse de son terrain, il souligne ainsi que ses observations « ont clairement mis en évidence que ce qui se déroule dans les ateliers de création relève bien d’une expérience esthétique ». C’est en ce sens que l’ouvrage de Francis Loser est intéressant et en même montre ces limites au regard des choix théoriques opérés.

En effet, cette recherche ne fait pas œuvre d’un travail sociologique, ce n’est d’ailleurs pas son objet. Néanmoins, le recours à certains outils de la sociologie, notamment dans le champ de la sociologie des faits artistiques, aurait permis de déconstruire la notion d’ « art » et son univers croyance (en rappelant qu’il s’agit d’une construction sociale), et de saisir sous un autre angle la notion d’« expérience artistique » (domaine encore peu investi par la sociologie) pour mieux l’analyser ensuite à travers les choix théoriques opérés par l’auteur. Il reste, cependant, qu’il s’agit d’un des rares ouvrages qui se soit penché sur ce qui se passe concrètement dans les ateliers de création artistique dans les établissements spécialisés du champ sanitaire et social. La richesse de son terrain est de ce point de vue exemplaire et pourrait servir d’appui aux recherches sociologiques qui s’intéresseraient à ce sujet.

NOTES

[1Docteur en sociologie et attaché de recherche à l’IRTS de Franche-Comté

[2http://www.ies-geneve.ch/Editions/ceres07_journal.pdf. Il s’agit d’un document de 240 pages qui relate des observations réalisées dans le cadre de la recherche.

Note de la rédaction

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