Avec cet appel à contributions « Médicaments et société » de la Revue Sociologie Santé, nous souhaitons soutenir l’analyse de quelques uns des enjeux socio-politiques actuels et à venir du médicament. Aujourd’hui, il tient une place considérable dans l’existence des individus et au sein des relations du système social. Il reflète la complexité de nos sociétés dans leurs dimensions à la fois les plus rationnelles et aussi les plus irrationnelles. Il est au carrefour de toutes les disciplines scientifiques et l’objet de croyances et d’espérances les plus grandes et il s’agit d’un univers extrêmement complexe : par la diversité des produits, par ses conditions de production, de diffusion, de consommation, ses risques, l’efficacité parfois discutable des produits enfin il est soumis à des réglementations et des procédures de contrôle plutôt strictes. (date limite pour la remise des propositions le 1er février 2009)
Plusieurs siècles avant notre ère les hommes employaient déjà des substances comme médicaments. Cependant, il y a seulement un siècle que nous sommes réellement entrés dans l’ère de la pharmaco-logie et que le médicament est devenu un produit central de la vie des sociétés modernes. Aujourd’hui, il tient une place considérable dans l’existence des individus et au sein des relations du système social. En effet il reflète la complexité de nos sociétés dans leurs dimensions à la fois les plus rationnelles et aussi les plus irrationnelles. Il est au carrefour de toutes les disciplines scientifiques et l’objet de croyances et d’espérances les plus grandes. Il s’agit d’un univers extrêmement complexe : par la diversité des produits, par ses conditions de production, de diffusion, de consommation, ses risques, l’efficacité parfois discutable des produits et il est soumis à des réglementations et des procédures de contrôle plutôt strictes.
Avec cet appel à contribution « médicaments et société » nous souhaitons soutenir l’analyse de quelques uns des enjeux socio-politiques actuels et à venir du médicament. Il constitue une sorte « d’analyseur » et ce que certains appellent « la médicamentation de la société » nous conduit à nous interroger sur le niveau de bien être qu’une société peut accorder à l’ensemble de ses membres. Ce numéro 30 de la Revue Sociologie Santé a donc pour ambition de participer à la constitution et au développement d’une sociologie du médicament qui, depuis l’ouvrage de Jean Pierre Dupuy et Serge Karsenty l’invasion pharmaceutique , est demeuré presque en l’état. Objet interdisciplinaire par excellence au sein de sciences dures et avec les sciences humaines il a été, jusqu’à ces dernières années, peu exploré par la Sociologie.
La problématique sur le médicament peut être schématisée par la phrase suivante : il s’agit d’une situation dans laquelle existe un consommateur (et aussi patient) à qui on prescrit un produit qui a été fabriqué, diffusé et financé dans un cadre précisément régulé. Nous avons donc 6 acteurs qui participent à la consommation et à la production de ce produit : le malade, le médecin, l’industriel, le pharmacien, l’assurance maladie et l’Etat. Pour cet appel à contribution nous construirons donc la problématique de ce numéro autour de trois axes généraux : le produit, les acteurs et les organisations et institutions.
1) Le Produit
Des milliers de produits sont définis comme médicaments et remboursés à ce titre. Les aspirations du consommateur (malade ou non) confèrent à ce produit son importance, pour les uns il peut être l’objet des espoirs les plus grands mais pour d’autres il peut avoir des effets dramatiques. Cette ambiguïté est consubstantielle au médicament, il se présente d’emblée de façon binaire comme remède et poison. Dépassant cette vision traditionnelle il s’agira de proposer des analyses sur les nouvelles et les diverses fonctions sociales du médicament au sein de ce continuum santé-maladie. Comment est-il utilisé ou contribue-t-il de fait à des redéfinitions sociales de la santé et de la maladie ? A quelles conditions peut-on parler de médicamentation de la société ? Peut-on faire un parallèle, et lequel, entre usage de drogue et usage de médicaments ? etc.
On souhaitera des contributions sur l’analyse des enjeux autour de la définition d’un produit comme médicament. Sur les usages de ce terme, les progrès en matière d’agro-alimentaire et de conception de nouveaux produits réduit-t-elle la frontière entre aliment et médicament ?
Dans ce domaine la recherche et l’innovation sont une des conditions du développement et de la survie des industries. Si, traditionnellement, les médicaments sont destinés à traiter les maladies, quelles forment prendront-ils à l’avenir et avec quelles conséquences sociales imaginables ? (le médicament outil de prévention ? comment la génétique rénove-t-elle la problématique du médicament ? etc.)
Le médicament est-il un produit destiné à la guérison, la prévention des maladies, pour le confort des individus, la performance de ceux-ci ou encore leur présentation de soi ? Quelles sont les implications de ces usages différentiés des même produits ?
Le médicament recherché pour son efficacité dans la guérison des maladies et l’amélioration des états de santé doit recevoir une Autorisation de Mise sur le Marché (AMM donnée par l’AFSSAP, Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé). Il a été jugé efficace dans certaines conditions et recevable au regard des risques potentiels. Mais, comme dans toute activité scientifique, les résultats sont fiables historiquement : ce qui est acceptable à un moment donné peut ne plus l’être quelques années plus tard comme dans le cas de la Cérivastatine et du Vioxx retirés du marché respectivement en 2001et en 2004.
La pharmacoépidémiologie a pour objectif scientifique l’étude et l’évaluation des médicaments et de leurs effets, désirables ou non, utilisés au sein des populations : il s’agit donc d’études post AMM. On attendra donc ici des contributions sur les fonctions sociales de ce nouveau domaine scientifique, des analyses sur l’usage de ces résultats d’étude et sur les enjeux sociaux de leur emploi.
Lorsqu’on parle des médicaments, la France est citée pour sa consommation élevée de psychotropes au regard des autres pays européens. Mais au-delà du constat, cela suppose déjà une analyse critique des modes de comparaison. On pourra aussi s’interroger sur les principaux facteurs explicatifs de cette évolution de la consommation, de l’utilisation de ce type de médicaments, les problèmes de dépendances, leur fonction sociale, etc..
2) Les acteurs
Cet axe concerne l’étude des interactions entre les individus qui agissent autour de ce produit pour le prescrire, pour le distribuer et le consommer. Entre ces trois acteurs nous avons des configurations différentes selon que l’on ait affaire à des médicaments à Prescription Médicale Obligatoire, (PMO) des médicaments à Prescription Médicale Facultative (PMF), ou encore des OTC (Over The Counter : des médicaments à Prescription Médicale Facultative (PMF) non prescrits et non remboursables).
L’analyse des interactions entre ces trois acteurs constitue un champ d’étude particulièrement fourni en problématiques diverses (la fonction symbolique du médicament, les effets placebo, le médicament comme médiateur, etc..). Nous serons plus particulièrement attentif aux propositions concernant l’automédication, l’observance, et l’éducation thérapeutique du patient et/ou du consommateur de médicament.
Dans la situation d’automédication , nous sommes face à un consommateur au plein sens du terme, qui analyse son besoin, évalue le prix qu’il pense accessible pour lui et achète le produit de son choix. En 2006 selon l’Association Française de l’Industrie Pharmaceutique pour une Automédication Responsable (AFIPA) le marché de l’automédication connaîtrait un essor économique notable, progressant de 9 % par rapport à l’année précédente. En considérant le marché de l’OTC (médicaments à PMF non prescrits et non remboursables) leur part d’automédication ne représente que 7 % du marché total du médicament en ville en France, contre 14 % en Allemagne ou 15 % en Espagne. Les déremboursements massifs de médicaments dans l’avenir favoriseront-ils ce type de consommation ?
L’automédication devient donc un enjeu nouveau. Comment le rôle du pharmacien va-t-il se trouver transformé ? Quelles relations nouvelles entre les professionnels vont émerger ? Le pharmacien sera-il un nouveau prescripteur ? Mais ne l’est-il pas déjà et alors deviendra-t-il prescripteur de médicament remboursable ?
La question de l’observance se pose dans le cas de médicament prescrit et également dans la situation d’automédication. Ces enjeux débouchent logiquement sur des formes de communication institu-tionnelle concernant le bon usage du médicament et la responsabilisation du patient à travers ce qu’on appelle aujourd’hui l’éducation thérapeutique. On pourra ici analyser les conséquences sur les relations entre le patient et les professionnels des situations dans lesquelles le patient a développé ses « capacités thérapeutiques ». Le pharmacien par exemple est devenu au fil du temps un agent de régulation sociale et technique ou encore le point de convergence entre les laboratoires pharmaceu-tiques, les patients/clients/assurés sociaux/citoyens, l’Etat et les médecins, des études sociologiques sur les évolutions de cette régulation sociale seraient dans ce nouveau contexte très intéressantes.
3) Les organisations et les institutions du médicament
Les industries du médicament sont souvent perçues comme « le grand méchant loup » pour reprendre le titre de l’ouvrage de Philippe Urfalino , elles feraient, cyniquement, des profits énormes sur la maladie des gens considérant le médicament comme un produit de consommation ordinaire. Le domaine d’étude est évidemment vaste, mais dans un secteur de forte concurrence où le patient est construit comme un consommateur on attendra des propositions sur les usages stratégiques de l’information et en particulier de l’information scientifique sur les médicaments, les maladies et plus largement sur les états de santé. Le lobbying des industries pharmaceutiques auprès des instances de régulation est bien connu mais il serait ici intéressant d’avoir des études, plutôt de type descriptif et qui nous présentent la complexité de ce tissu organisationnel ou nous donnent une plus grande visibilité de ce tissu d’organisations professionnelles diverses situées entre l’industrie du médicament et les institutions de l’Etat et de l’Union européenne et qui ont des missions diverses (soutenir la recherche, faire la promotion des produit, participer à l’élaboration des normes, des prix etc..). A l’opposé sur le pôle de la consommation on pourra observer comment les patients développent des comportements de clients/usagers usagers de ces produits notamment avec la « juridiciarisation de la consommation médicamenteuse ».
Concernant l’innovation et la production de médicaments se tissent des liens entre la recherche fondamentale en biologie et la recherche opérationnelle. Nous attendons également des propositions d’article sur ces relations, les relations entre le privé et le public, les questions éthiques, etc..
4) Le médicament est un objet éminemment juridique.
On peut réellement parler de système autour de ce produit qui fait converger les approches biologique, économique, sociologique, politique avec une grande diversité d’acteurs et d’organisations professionnels. La norme juridique peut être considérée comme l’instrument central de régulation de l’ensemble de ce système. Le droit interne et le droit communautaire du médicament encadre toutes les pratiques dans ce domaine depuis la conception du produit jusqu’à sa consommation et par conséquent les relations entre les acteurs de ce système . Les différentes agences comme l’AFSSAPS au niveau national ou l’Agence Européenne des Médicaments (EMEA) au niveau européen sont parmi les plus importants organismes régulateurs du médicament. Le contrôle de l’État et des agences européennes s’exerce donc sur l’ensemble de ce système et notamment avec l’Autorisation de Mise sur le Marché (l’AMM) et l’Autorisation Temporaire d’Utilisation (ATU). Cela constituent les deux enjeux majeurs dans ce processus conduisant de la conception à la consommation du médicament.
Une fois établie la norme juridique détermine les comportements des acteurs. On attendra ici des propositions concernant l’évolution du rôle de l’Etat dans le processus d’élaboration du droit, des analyses sur les questions d’harmonisation du droit entre le niveau national et le niveau européen, ce qui relève de l’un et de l’autre. La mise en vente libre de 220 médicaments (non remboursables) nous montre qu’une simple modification du statut juridique de certains médicaments génère des changements dans les relations entre les acteurs du système de santé notamment entre les prescripteurs, les pharmaciens et le patient/consommateur.
La norme juridique qui prend la forme d’une formulation discursive et d’un argumentaire est souvent, plus ou moins, l’objet de controverses entre les différentes acteurs (instances publiques, entreprises, associations professionnelles diverses etc..), elle devient donc elle-même un enjeu entre les acteurs. Ces derniers discutent les normes (du moins certaines), leurs fondements pour justifier des projets, des actions etc. Comment les normes juridiques deviennent-elles un enjeu stratégique et quels sont les usages stratégiques de ces normes et des argumentaires faits par les différents acteurs selon les situations ?
Le droit encadre les conditions de production, de prescription, d’usage et par conséquent ce qui sera reconnu comme l’efficacité et les risques d’un médicament. Dans quelles mesure constitue-t-il un frein ou un levier vis à vis de la problématique efficacité/risque d’un médicament ? A ce niveau on ne saurait oublier la question du droit des patients face à l’accessibilité des médicaments et de leur usage (bon usage ...) ? L’influence des logiques juridiques et du droit du médicament conditionnent le statut des produits, comment évoluent les concepts de médicament et de produit de santé ?
Nous sommes donc là on l’interface du droit et de la biologie. Le développement des nouveaux médicaments et les thérapies cellulaires, géniques, supposent une adaptation de la norme juridique.
NORMES
Revue Sociologie Santé
8 rue du Général Bordas 33400 Talence
Les textes soumis au Comité de rédaction de la Revue Sociologie Santé doivent être adressés par courrier électronique à sociologie_sante_redaction@yahoo.fr ou à kotobi@free.fr
Ils sont dactylographiés selon la forme la plus simple : les titres et sous-titres sont numérotés sans être hiérarchisés par une police de caractères particulière. Les notes sont situées en bas de page (procédure d’appel de note à partir du logiciel Word). Les articles proposés ne peuvent dépasser 50 000 signes, espaces, notes, tableaux, graphiques et illustrations compris. Ils sont impérativement accompagnés d’un résumé en français et en anglais de 1 000 signes au maximum, portant également la traduction anglaise du titre de l’article ainsi que d’une série de mots-clefs, en français et en anglais.
Les nom et prénom(s) des auteurs des articles proposés sont accompagnés de leur titre et de leur adresse institutionnelle, et, si possible, d’un numéro de téléphone personnel (destiné à la seule rédaction) ainsi que d’une adresse électronique.
Conventions bibliographiques
Nous recommandons aux auteurs d’adopter les normes typographiques de l’éditeur : times 10 espacement 12.
Les conventions générales pour la bibliographie sont les suivantes :
Livres : NOM Prénom (en entiers), titre complet en italique, lieu d’édition, éditeur, année d’édition, nombre de pages.
Articles : NOM Prénom (en entier), « titre complet entre guillemets », titre de la revue (en entier et non abrégé), catalogue, actes... (en italique), date, numéro, pagination.
Contributions à des ouvrages collectifs : NOM Prénom (en entier), « titre entre guillemets », dans NOM Prénom (en entier) [dir.], titre de l’ouvrage, catalogue, actes, mélanges... (en italique), lieu d’édition, éditeur, année d’édition, pagination.
Enfin nous invitons les auteurs à proposer pour leur article un titre concis.
Figures et cartes
Figures, cartes et graphiques doivent être fournies avec leur titre sur support informatique et doivent pouvoir s’insérer dans le "gabarit" de la Revue à savoir : en largeur 12 cm maximum et en hauteur 18 cm maximum. L’auteur doit s’assurer de leur lisibilité. L’impression est en nuances de gris (donc pas en couleur).
Procédure d’expertise
Dès réception, les articles sont confiés à deux lecteurs choisis par le Comité de rédaction dans le conseil scientifique ou extérieurs à la revue. L’auteur est informé des suites données à son texte. Les manuscrits non retenus ne sont pas retournés. Les textes retenus sont renvoyés à l’auteur après corrections pour qu’il valide celles-ci ou apporte les modifications nécessaires.